Né en 1965 à Boulogne-Billancourt, Thierry Pécou a étudié l’orchestration et la composition au C.N.S.M. de Paris.
Il a été pensionnaire à la Casa de Velazquez à Madrid, lauréat du Prix Villa-Médicis Hors les Murs, et a reçu de nombreux prix pour ses compositions, qui font l'objet de commandes de la part d'institutions et d'interprètes renommés.
Ses œuvres ont ainsi été interprétées dans des lieux tels que les festivals « Présences » à Radio-France, l’opéra de Umea en Suède, la Gaudeamus Music-Week à Amsterdam, l’Automne de Moscou, les New Music Concerts à Toronto, le Foro Internacional de Musica Nueva de Mexico, Automne en Normandie, le Festival d'Ambronay, Bath Music Festival, Tampere Choir Festival (Finlande), Shanghai Spring Music Festival, ainsi qu’à l’Auditorium de Yokohama au Japon, et à la salle Pleyel, aux Théâtre de la Ville et Théâtre des Champs Elysées à Paris.
Ce compositeur est l’un des rares musiciens à réunir le geste de la composition et son incarnation sur la scène.
Il interprète fréquemment ses propres œuvres, au piano ou à la tête de Zellig, ensemble à géométrie variable dédié à la création, dont il est le fondateur, ou en soliste avec orchestre, pour ses concertos pour piano (Tremendum et L'Oiseau innumérable). Thierry Pécou s’est engagé très tôt dans un itinéraire singulier, à l’écart des notions d’avant-garde, et de post-modernité centrées de manières univoques sur l’histoire esthétique de l’occident. Au fil de ses créations, le compositeur est allé à la rencontre de cultures éloignées dans l’espace et dans le temps : les langues et l’imaginaire de l’Amérique précolombienne et des sociétés amérindiennes dans la Symphonie du Jaguar et la cantate Passeurs d’eau, les mythes grecs qui ont inspiré Les filles du feu, les traces de l’Afrique et de l’Amérique dans Tremendum un carnaval brésilien, Outre-Mémoire et l’Oiseau innumérable, mais aussi la Chine ancienne, la spiritualité tibétaine… En rencontrant ces traditions, Thierry Pécou, « rêve de faire résonner le monde entier », et cherche à redonner à la musique sa dimension de rituel. Ainsi conçue, la musique invite, absorbe l’auditeur. La forme musicale est alors indissociable du geste corporel. La forme, le geste de l’instrumentiste et éventuellement, la danse, s’inscrivent dans le même échange d’énergie qui caractérise les cultes afro-américains – tel le candomblé brésilien ou les rituels chamaniques amérindiens
Sa musique s’inscrit dans le souffle épique du Tout-Monde que le prédit poète martiniquais Edouard Glissant et qui n’est pas une totalité uniforme mais la multiplicité imprévisible de toutes nos singularités. Pour Thierry Pécou, la complexité n’est pas l’objet d’un art : elle résulte d’une écoute du monde. C’est ainsi que la virtuosité compositionnelle que l’on entend dans Vague de pierre côtoie la répétition incantatoire de simples formules mélodiques, tout comme, aux abords d’une île, un cordon uniforme de sable longe la végétation enchevêtrée de la mangrove.
Thierry Pécou sait également sculpter le son vers le silence pour dévoiler et dépasser un autre silence : celui auquel ont été réduits les peuples et les cultures victimes de l’expansion coloniale de l’Occident. C’est par la métaphore et par l’invocation que Ñawpa oppose sa résistance à la destruction dont a été l’objet la musique rituelle de l’ancienne civilisation andine de Tawantinsuyu. C’est par la force de l’intention poétique et l’adresse de l’écriture qu’Outre-Mémoire ressuscite la mémoire interdite des victimes de la traite négrière.
Pour Thierry Pécou, écrire c’est se trouver face à l’autre homme, dans sa fragilité et sa souffrance.
Pourtant, la substance et la forme musicale ainsi que leur réception ne peuvent être circonscrites par un système ou réduites à l’expression d’une idéologie. Elles accompagnent la pensée du compositeur mais acquièrent leur propre existence, qui dépasse le geste et le moment de la création.